Interview Boris Wastiau

Anthropologue de formation, Boris Wastiau aime le défis. Et il en a réalisé un, et non des moindres, : œuvrer à la rénovation du Musée d’ethnographie de Genève, MEG de son petit nom. Éclairage sur une magistrale réussite ! Décrire le parcours d’un pareil personnage est inutile tant l’homme cultive l’ubiquité : « j’ai étudié un peu partout en Europe : à Bruxelles, à Coimbra, à l'Université de East Anglia, en Grande Bretagne, puis j'ai eu la chance de découvrir différents pays au gré de mon activité professionnelle : Portugal, Angleterre, Zambie, Congo, Belgique, etc. » Depuis 10 ans à Genève, il s’y trouve comme un gardon dans l’Arve : « Travailler sur le projet d’agrandissement du MEG fut une opportunité unique et j’ai pu la réaliser dans des conditions optimales ».

Le résultat ? Un chiffre de fréquentation sept fois plus élevé qu’avant les transformations ! Cerise sur le gâteau, le lieu vient d’être couronné en mai du prestigieux Prix du Musée européen qui récompense chaque année une institution pour l’exceptionnelle qualité de son offre culturelle et son influence significative au niveau national et international ! Et Boris Wastiau de s’enthousiasmer : « à Genève, nous avons des potentiels de développement formidables, une liberté de penser largement respectée, et une flexibilité remarquable dans l’organisation des institutions. Je connais un certain nombre de projets comparables démarrés avant le nôtre et qui sont encore loin d’être terminés… ».

Un quartier en devenir
Pourtant lorsqu’il gagne la Suisse en 2007, le directeur du MEG s’avoue dubitatif quant à l’attractivité de l’environnement: « le quartier des Bains était un peu tristounet. Il y avait bien ce réseau de galeries des Bains et ses vernissages prestigieux qui attiraient une foule phénoménale, mais ce n’était pas un public d’habitués. C’était presque comme si les gens venaient s’encanailler dans un quartier dont on avait encore un peu peur, tant il n’avait pas franchement bonne réputation. Aujourd’hui, tout a tellement changé ! La passerelle Hans-Wilsdorf, les travaux de la RTS, et surtout la rue de l’Ecole-de-Médecine, ont modifié drastiquement le paysage et permis de créer un quartier très animé, sans que l’on puisse craindre sa gentrification. Sa nature mixte assumée qui réunit étudiants, business men et amateurs de musées, en est la preuve. »

Rester dans le Bain
Boris Wastiau est un régulier du Café des Bains, et c’est un véritable privilège pour notre établissement tant il abhorre déjeuner et préfère se concentrer sur le diner qu’il prépare lui-même quasiment tous les soirs pour ses trois jeunes ados, à leur plus grande satisfaction ! « Je travaille généralement en non-stop tous les jours, mais si je dois déjeuner je choisis immanquablement le Café des Bains ! L’accueil y est extraordinairement sympathique, le service toujours impeccable. J’apprécie particulièrement d’y convier des invités – artistes ou visiteurs du MEG –, car je sais que cela leur fera plaisir. Ici, c’est simple et efficace, point de monotonie, mais au contraire une créativité exceptionnelle ! Les menus sont si diversifiés, la cuisine si délectable que je me sens en toute confiance. Je reconnais beaucoup de gens, quand je m’y rends. Lorsque je souhaite inviter, cela m’évite toutes les questions du style : où emmener mes convives ? Est-ce que ça sera bien ? Au Café des Bains, c’est toujours très bien ! »

Quoi de neuf ?
Il faut absolument visiter la nouvelle expo du MEG, tout juste inaugurée vendredi et qui s’intitule « L’Effet boomerang, les arts aborigènes d’Australie ». Le MEG y dévoile l’une de ses plus belles collections et révèle la richesse du patrimoine culturel de l’Australie. Au fil du parcours, on comprend comment les tentatives de suppression de la culture aborigène depuis le 18e siècle se sont soldées par un résultat inverse de celui désiré. Avec deux artistes de renommée mondiale : Brook Andrew, artiste en résidence d’origine écossaise et aborigène, et Michael Cook, photographe et plasticien. Ce dernier expose l’une de ses oeuvres emblématiques : un montage qui symbolise l’arrivée de James Cook en Australie en 1770 ainsi que « Mother », une série qui évoque les « générations volées », ces générations d’enfants aborigènes qu’on a soustrait à leur famille pendant presque un siècle pour stopper la transmission de leur culture. Une formidable exposition qui ne laissera personne indifférent.

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